Le 8 août 2019 restera sans doute gravé dans l’esprit des habitants de Fialofa. Pour cause, c’est le jour où l’électricité est arrivée dans ce village situé de la commune rurale de Sarobatra. En effet, ce fokontany a été raccordé à la pico-centrale hydro-électrique d’Andriamamovoka de 100 kW grâce notamment au soutien du programme ENERGIES qui a cofinancé la réhabilitation d’un barrage existant, ainsi que l’installation de deux turbines de 50 kW et la mise en place de réseaux de basse et moyenne tension.

La pico-centrale a été inaugurée lors d’une cérémonie animée à Fialofa lors de laquelle le secrétaire général du ministère de l’Energie, de l’eau et des hydrocarbures a activé un levier raccordant le village à la centrale. Selon l’opérateur de la centrale, la société WeLight Madagascar, « l’objectif du projet était de construite une solution d’électrification rurale hydro-électrique, mais aussi de renforcer les compétences malgaches en électromécanique et de soutenir la commune de Sarobaratra en matière de gestion d’ouvrage communautaire. L’ensemble des acteurs du projet ont apporté un soin particulier aux choix et a la réalisation de ces infrastructures : l’adéquation avec les besoins réels en énergie des villageois, la durabilité et la résistance aux aléas climatique ont été des éléments priorisés tout au long du projet ».

A quelques kilomètres de piste de Fialofa, en contre-bas d’une série de collines ocrées, s’érige la pico-centrale hydro-électrique qui fournira dans un premier temps de l’électricité à 375 ménages et 13 activités génératrices de revenus, à l’instar de la rizerie de Mme Claudine. Mais ce projet cofinancé à hauteur de 225 000 euros (soit 46.7% du coût total) par le programme ENERGIES diffère des autres initiatives de ce genre sur un point important : les turbines qui produiront l’électricité de la centrale ont été fabriquées localement, dans un atelier où sont formés des apprentis issus de familles défavorisées.

La philosophie de l’Atelier Tsiky (Sourire) de l’Association PATMAD qui a porté le projet de pico-centrale hydraulique en collaboration avec le Centre Ecologique Albert Schweitzer (CEAS) et l’Association des ingénieurs pour le développement des énergies renouvelables (AIDER) était claire : tout fabriquer localement. Ainsi, turbines, pompes, séchoirs solaires et même des prototypes d’éoliennes ont été produits dans un atelier de serrurerie métallique, de menuiserie bois et d’électromagnétique situé à Ambatomirahavavy.

Comme l’explique le directeur exécutif de l’Association PATMAD, Bako Andrianirinah, le fait d’avoir bénéficié d’une subvention sous le volet Appel à Propositions du programme ENERGIES « a permis à l’association, ainsi que ses partenaires techniques de mettre au point une pico-turbine hydraulique de plus grande puissance qui nous permettra de toucher beaucoup plus de bénéficiaires, en incluant de petits projets industriels ».

Le choix du site s’est fait suite aux propositions de l’Agence de développement de l’électrification rurale (ADER) « en fonction de certains critères propres au modèle de pico-turbine que l’Association PATMAD allait construite pour ce projet, notamment des turbines du type Banki, l’implantation de l’atelier de fabrication, potentiel économique, accessibilité, etc. ».

Sur place, l’opérateur retenu par l’association, en l’occurrence Sagemcom, découvre grâce à des fouilles quasi-archéologiques que le canal d’amenée de l’ancien barrage construit en 1982 est largement intact. Une rare bonne surprise dans ce genre de chantier. Mais pour le reste – chambre de mise en charge, conduite forcée et le bâtiment de la centrale – il a fallu commencer quasiment à zéro.

« L’électricité permettra non seulement l’éclairage de certains espaces communautaires, mais aussi et surtout le développement d’activités génératrices de revenus (AGR). Il s’agit notamment de permettre aux paysans qui sous-traitaient certains travaux comme le décorticage du riz de l’effecteur eux-mêmes sur place. Ce premier projet constituera un modèle que l’association espère répliquer dans d’autres zones », affirme Bako Andrianirinah. Un représentant par village sera chargé de démarcher des clients potentiels.

L’Association PATMAD a été confortée dans son approche par une visite de l’Atelier Tsiky organisée par le Ministère de l’Energie et des hydrocarbures à l’occasion de la Journée mondiale de l’énergie le 22 octobre dernier. « L’évènement a vu la participation de près de 150 personnes issues de diverses organisations intervenant dans le domaine du développement rural et relayé au niveau de tous les médias malgaches. Ce fut une consécration pour l’Atelier Tsiky et PATMAD dans la mesure ou les deux entités ont toujours un peu travaillé dans l’ombre. Pour féliciter l’association dans ses efforts, l’atelier a reçu des équipements dont elle ne disposait de la part du ministère de l’Energie. Cela n’aurait pas été possible sans la visibilité donnée par la COI. »

Cette reconnaissance aidera également PATMAD à se rapprocher d’un autre objectif cher à l’association, celui de positionner l’atelier Tsiky comme prestataire de référence sur le marché de la fabrication de turbines hydro-électriques au niveau local. « C’est un marché encore méconnu actuellement car aucune étude sur le sujet n’a été mené mais qui a de forte chance de se développer dans le moyen terme », estime Bako.