Tatiana Patchama1. Qui êtes-vous ? 

Tatiana Patchama, artiste commissaire. Mon atelier est installé à La Réunion où je vis et travaille.

2. Comment êtes-vous devenue artiste ?

J’ai fais mes études à l’Ecole des Beaux-Arts de La Réunion, dont une année à l’Accademia di Belle Arti di Bologna (Italie) où j’ai découvert la scénographie. Après mes études, j’ai voulu d’abord explorer l’envers du décor du monde de l’art et voir les métiers possibles. Ma première expérience a été de travailler en tant qu’assistante scénographe lors d’une exposition collective d’artistes de l’Hémisphère Sud intitulée « Art Actuel », le scénographe de cette exposition m’a généreusement transmis sa passion. Ensuite, j’ai travaillé pendant 4 ans pour la galerie Béatrice Binoche qui m’a ouvert de nouveaux horizons et m’a fait rencontrer des artistes au parcours incroyable. Ce fut une expérience enrichissante qui m’a donné envie d’entreprendre mes propres projets, c’est ainsi de j’ai créé ma structure qui s’appelle l’atelier Ti-Pi  qui existe depuis 5 ans.

3. Quelle est (sont) vo(s) spécialité(s) et habituellement, qui est votre public cible ?

Dans mes projets, je mets souvent le public dans une posture active, l’objectif étant qu’il s’approprie l’installation ou le contenu de l’exposition en le manipulant. Mes projets sont en général à destination du jeune public.  Je souhaite que les visiteurs soient à l’aise dans mes installations, il est donc important pour moi d’intégrer un certain confort pour que le public puisse prendre son temps, s’amuser et apprendre des informations importantes de façon intuitive.

4. Pouvez-vous nous parler de l’exposition « Cétacé mystérieux » ?

Cette exposition est une initiative de la Région Réunion. Elle a été réalisée avec l’accompagnement du CEDTM, une équipe scientifique composée de l’association Globice, de l’équipe de Stella Matutina, Cetamada et de mon équipe (Elsa Lauret // graphiste, Ulric Grondin // dessinateur, rédacteur…). Mon projet était de faciliter l’accès au contenu scientifique en concevant des jeux et en proposant le contenu scientifique sur des panneaux avec d’un côté une image et de l’autre l’explication. Chaque thématique était abordée sous forme de questions, par exemple pourquoi les baleines sautent ou pourquoi elles chantent ? Les jeux mis en place dans l’exposition proposent  aux visiteurs soient de comprendre en jouant, un sujet complexe comme le chant ou de les sensibiliser sur des problématiques comme la protection des baleines. Le public pouvait ainsi découvrir les menaces que rencontrent les baleines lors de leur migration par le biais d’un jeu inspiré du jeu de l’oie.

Une partie de l’exposition est à la carte, car les panneaux d’exposition sont de petit format et en carton pour faciliter la manipulation. Les visiteurs sélectionnent les thématiques qu’ils souhaitent approfondir en fonction des images ou des sujets qui les interpellent. Du mobilier en carton est mis à leur disposition pour qu’ils puissent s’installer et lire confortablement.

Cette exposition était un challenge car nous l’avons réalisé en 4 mois et demi, un temps qui est très court pour un projet aussi conséquent mais grâce au travail d’équipe nous avons su trouver notre équilibre et dépasser nos limites pour que ce projet puisse prendre forme. Les baleines à bosses sont fascinantes et nous sommes fiers de pouvoir partager tout ce que nous avons appris avec le public.

5. Est-ce la première fois que vous travaillez en faveur de la préservation de la biodiversité ?

C’est la première fois que j’intègre du contenu scientifique dans une de mes expositions. Habituellement, je réalise des expositions et installations pour sensibiliser le public à l’art contemporain.

Pour être sincère, je n’étais pas une spécialiste des baleines à bosse, j’ai appris beaucoup en travaillant avec l’équipe scientifique. Au début, je pensais que mon ignorance au sujet des baleines était un gros point faible pour ce projet mais, au fur et à mesure je me suis rendue compte que c’était un énorme atout car je pouvais me mettre à la place du public. Cela m’a permis de  concevoir des outils ludiques pour leur expliquer simplement tout ce que j’avais appris avec les scientifiques sur les baleines à bosse.

6. Quels sont vos projets personnels et/ou professionnels ? Un rêve qui vous tient particulièrement à cœur ?

J’ai travaillé ces dernières semaine sur la scénographie d’un évènement annuel à la Réunion qui s‘intitule « Au bonheur des enfants » et se produit juste avant les fêtes de Noël. Cette année, la thématique était d’amener le public dans la redécouverte des contes, pour cela nous avons réalisé grandeur nature certaines maisons de conte, comme celle de la grand-mère du Petit Chaperon Rouge, de Hansel et Grétel ou de Blanche-Neige. En parallèle, je travaille à un projet d’exposition ludique qui me tient à cœur sur les arbres. Mon souhait serait que le public puisse avoir accès à l’art ou la science de façon simple et détendue tout en s’amusant. Il est important à mon avis que le public s’investisse dans la visite de l’exposition, c’est une façon de leur confier un sujet qui nous passionne pour qu’il s’implique à leur tour.

7. Un message à passer ?

Je souhaite que le public soit curieux, s’amuse et n’oublie pas que nos actes ont d’une façon ou d’une autre un impact sur notre environnement. Il est tout à fait possible de faire de cet impact une action positive. En tant qu’Homme, nous devons à la fois faire preuve d’humilité et de bienveillance vis à vis des autres espèces qui nous entourent car ils contribuent en grande partie à rendre merveilleux le monde dans lequel nous vivons et qu’ils ont encore beaucoup de secret à nous révéler.  Les ancêtres des baleines sillonnaient les océans avant même notre apparition, ils sont un trésor d’informations comme beaucoup d’êtres vivants sur cette planète et nous avons le devoir de prendre soin d’eux. Ces géants des océans sont des êtres particulièrement fragiles entre nos mains. N’oublions jamais que ce sont des trésors de la nature à regarder avec émerveillement.