2022 marque le démarrage des activités du projet de résilience côtière (RECOS). Ce projet, financé par l’AFD et le FFEM à hauteur de 10 millions €, vise à renforcer la résilience des populations littorales face aux défis sociétaux et aux risques climatiques en restaurant et préservant les écosystèmes côtiers dans les pays de la COI. Il s’agit de faire perdurer les services de régulation, de protection, d’approvisionnement, de support et bienfaits culturels que les écosystèmes rendent aux sociétés.

Des littoraux sous pression

Environ 40 % de la population mondiale et 80% de la population indianocéanienne vit à moins de 100 km des côtes. De fait, les littoraux concentrent des activités humaines qui les mettent sous pression. Le changement climatique a également des effets négatifs sur les côtes : érosion, blanchissement des récifs, élévation du niveau marin… Or, les modèles durables d’activité humaine dans les zones côtières dépendent d’un environnement marin sain. Et inversement.

Restaurer et préserver les côtes = résilience

Ce sont les maitres-mots. Les populations côtières dépendent fortement de la bonne santé des écosystèmes. Aussi, restaurer et préserver les milieux côtiers, c’est participer à la résilience des populations. Les gains ne sont pas qu’écologiques : ils sont aussi économiques, alimentaires, sanitaires, sociétaux et culturels.

Sites pilotes

Le projet RECOS soutiendra, entre autres, des initiatives de réhabilitation côtière. Le projet applique sur le terrain des solutions fondées sur la nature.

Dix sites pilotes avaient été identifiés lors de l’étude de faisabilité du projet sur la base de trois principaux indices :

  • Les risques climatiques et les vulnérabilités des territoires et populations ;
  • La typologie et les caractéristiques des écosystèmes (vulnérabilité, irremplaçabilité) ;
  • L’état de la gouvernance des sites (existence de statut de conservation, présence de gouvernance de gestion intégrée, appuis antérieurs de la COI).

Actuellement, les Etats membres sont en train de confirmer ces sites et les porteurs des projets. Pour l’heure, les échanges avec les acteurs nationaux portent sur différentes approches d’aménagement durable et de protection du littoral face à l’érosion côtière, de restauration et gestion durable de mangroves, de gestion durable des pêches ou encore de restauration de récifs et de gestion durable des lagons. D’autres projets seront également identifiés sous RECOS à travers d’autres modalités de financement.

Questions à… Christophe Legrand, coordonnateur régional du projet RECOS

En quoi les écosystèmes côtiers (mangroves, marais salants, herbiers marins…) sont essentiels pour le climat ?

Selon « The bue Carbon Initiative », les écosystèmes côtiers séquestrent et stockent de grandes quantités de carbone bleu à la fois dans les plantes et les sédiments qui se trouvent en dessous.  83 % du cycle mondial du carbone circule à travers l’océan, y compris les écosystèmes côtiers. Il faut savoir que les habitats côtiers couvrent moins de 2 % de la superficie totale des océans. Pourtant, ils représentent environ la moitié du carbone total piégé dans les sédiments océaniques ! Notre capacité à adresser le changement climatique dépend donc en grande partie de notre habilité à préserver ces écosystèmes. De nombreux composants des écosystèmes côtiers assurent une protection importante des côtes. Ce faisant, ils contribuent significativement à la résilience des écosystèmes et des populations côtières. C’est le cas des mangroves, par exemple.

Le saviez-vous ?

26 milliards $ / an

C’est la valeur économique estimée des produits et des services fournis par l’environnement naturel de la région de l’océan Indien.  La pêche et le tourisme en sont les éléments principaux.

Les milieux côtiers et marins sont aussi parmi les écosystèmes les plus productifs de la planète…

Effectivement. La préservation et la valorisation des écosystèmes côtiers de l’océan Indien sont donc des enjeux majeurs pour assurer la pérennité de ces atouts écologiques, sociaux, économiques et culturels pour les territoires. Ces écosystèmes permettent la conservation du patrimoine côtier et marin et maintiennent les mécanismes vitaux de l’océan. Un écosystème en bonne santé fournit la sécurité alimentaire aux populations locales, ainsi que des ressources pour une croissance économique, des activités de loisirs et de tourisme, et agit comme réservoir de biodiversité. Pour assurer leur résilience et gérer leurs usages de manière responsable, une vision globale de ces enjeux et une réponse commune au niveau régional sont nécessaires.

Quelles sont les principales causes de la dégradation des écosystèmes côtiers ?

Les zones côtières sont très vulnérables. Elles sont sujettes à des dégradations qui résultent d’une part d’activités de nature humaines non climatiques et d’autre part des effets induits par le changement climatique, qui se renforcent mutuellement. Les activités humaines non climatiques sont principalement liées à l’urbanisation côtière extensive et à l’utilisation non durable des ressources naturelles côtières. Par exemple, l’extraction de sable, la destruction de mangroves, l’utilisation intensive des ressources d’eau douce, ou encore les pollutions chimiques, plastiques et sonores.

Vous évoquiez aussi les effets du changement climatique…

Les premiers dangers pour les zones et les écosystèmes côtiers sont l’élévation du niveau de la mer et les risques liés au climat tels que les vagues de chaleur marine, les cyclones, les ondes de tempête associées et les fortes précipitations. Ces évènements extrêmes, historiquement rares, deviendront courants d’ici 2100. En plus, on note une accélération de l’élévation du niveau moyen mondial de la mer. Les îles et les côtes de basse altitude de l’Indianocéanie sont particulièrement menacées par l’accélération de cette élévation marine et les phénomènes extrêmes qui y sont associés. Des eaux plus chaudes entraînent également l’acidification et la désoxygénation des océans, des vagues de chaleur marines, des changements dans la productivité et la circulation océaniques, ainsi que des modifications de la biodiversité.

Au cœur du projet RECOS, il y a les solutions fondées sur la nature. Concrètement, qu’est-ce que c’est ?

Il y a des définitions communément utilisées pour définir les solutions fondées sur la nature comme celle de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). L’idée générale à retenir est que la gestion durable des écosystèmes permet de restaurer et préserver les services écologiques rendus par ces écosystèmes pour résoudre les problèmes résultant d’une mauvaise utilisation des terres ou des ressources, du changement climatique ou des défis sociétaux. Les solutions fondées sur la nature utilisent ce dont les milieux naturels disposent pour améliorer les infrastructures naturelles ou artificielles existantes pour que les populations vivent dans un bien-être social, économique et environnemental qui perdure d’une génération à l’autre.

C’est donc cette approche qui sera privilégiée dans la mise en œuvre du projet…

Oui mais en tenant compte des situations. Les solutions sont souvent hybrides ou intégrées. Il est alors nécessaire d’établir les synergies entre ces différentes solutions pour un meilleur impact. Ces solutions fondées sur la nature jouent un rôle très important dans l’adaptation et l’atténuation au changement climatique, auquel les pays de la COI et les pays insulaires en général sont particulièrement exposés.