Le 24 avril 2025, Antananarivo était la capitale de l’Indianocéanie. En effet, Madagascar a accueilli le 5e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la COI. Cette rencontre au sommet s’est tenue 10 ans après le Sommet de Moroni en 2014. Objectif ? Etablir le bilan de 40 ans de coopération au sein de la COI et, surtout, donner une impulsion politique à l’action régionale. La priorité ? La sécurité alimentaire régionale.

Le thème du Sommet d’Antananarivo était: « Sécurité et souveraineté alimentaires pour le développement du marché de l’Indianocéanie ».

Pour le président de la République de Madagascar, hôte du Sommet, M. Andry Rajoelina,

 » Ce thème […] résonne avec la plus grande importance , face aux défis que le monde nous impose et les enjeux actuels. La crise alimentaire, le changement climatique, l’instabilité économique et les tensions géostratégiques nous poussent à revoir et à repenser notre stratégie. C’est pour cette raison que nous devons produire et transformer localement, dans notre sous-région, tout ce dont nos populations ont besoin : la sécurité alimentaire est la clé du développement et est notre priorité »

Vers un espace régional de production agricole et d’échanges

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont tous confirmé l’importance d’investir davantage dans la production agricole et alimentaire régionale. Et pour cause: les secteurs de l’agriculture et des pêches constituent des leviers de développement durable. De fait, les effets de liaison concernent la santé nutritionnelle, l’emploi, la croissance économique, l’industrialisation, les infrastructures de production et de distribution, le commerce. Et aussi: résilience climatique, biodiversité, recherche scientifique, entre autres.

Le Secrétaire général de la COI, M. Edgard Razafindravahy, confirme:

« Il ne s’agit pas seulement d’agriculture, de commerce ou de connectivité. Il s’agit aussi de santé, de nutrition, de résilience climatique, de protection des écosystèmes, de valorisation de notre patrimoine culturel, de modes de vie durables. En impulsant, au plus haut niveau, la dynamique de sécurité alimentaire et de commerce régional, nous traçons un cap ambitieux pour notre avenir commun. C’est dans cet esprit que nous avons proposé la création d’un espace agricole régional, fondé sur la confiance et des ambitions partagées. »

L’enjeu de la sécurité alimentaire est crucial pour le devenir de l’Indianocéanie. A ce jour, les besoins alimentaires de la région sont couverts à près de 80% par des importations au-delà de l’Indianocéanie. Riz, grains secs, oignons, ails, provendes… les importations sont nombreuses et coûteuses, financièrement et écologiquement! En outre, à cette dépendance aux importations s’ajoutent une connectivité intrarégionale limitée et non-compétitive, une productivité à l’hectare inférieure à celle des pays fournisseurs, des coûts de production et d’acheminent onéreux ou encore une vulnérabilité aux effets du changement climatique.

L’impulsion politique et le cap fixé par les chefs d’Etat et de gouvernement de la COI

Se félicitant de la volonté commune d’unir nos forces pour produire davantage dans la région pour nourrir la région, le président de l’Union des Comores et président en exercice de la COI, M. Azali Assoumani soutient

 » […] la mise en place de zones de production agricoles et alimentaires dans nos îles en canalisant l’investissement public et privé et en visant l’augmentation substantielle de nos échanges commerciaux intra-COI. Ces zones de production agricoles et alimentaires régionales peuvent devenir des instruments productifs et compétitifs qui créent de nutritionnelle et dynamisent les échanges commerciaux entre nos pays qui restent encore très en-dessous de nos ambitions et de la simple logique. J’appelle donc les partenaires, les observateurs et aussi le secteur privé à travailler de concert avec la COI pour transformer cette ligne d’action politique commune en un véritable programme d’action. »

Dans la même veine, le président de la République française, M. Emmanuel Macron, voit trois chantiers:

« D’abord, stimuler la production […] et améliorer les infrastructures, en particulier agro-logistiques. Et pour cela, il nous faut plus d’investissements du secteur privé, ce qui exige notamment un climat des affaires sûrs, prévisibles, ce qui suppose aussi davantage de formations dans les métiers agricoles. […] Ensuite, c’est consolider un cadre normatif qui nous protège. Les normes sanitaires et phytosanitaires ne sont pas un obstacle au développement de la production, mais un atout pour la compétitivité à l’export, pour la santé de nos populations. Mais nous voulons, pour ce faire, avoir un cadre commun au niveau de la COI.. […] Enfin, c’est aussi le chantier qui consiste à mieux intégrer les chaînes de valeurs régionales, et je salue ici l’idée d’un espace de production et d’échanges agricoles et alimentaires au sein de la COI, ce qui permettra d’accélérer cette dynamique, d’avoir, là aussi, l’espace qui permet les bons investissements »

En résumé, « cet espace de confiance » doit être capable :

  • De garantir la disponibilité de terres à vocation régionale tout en facilitant et sécurisant les investissements ;
  • De renforcer la connectivité et la mobilité entre nos îles ;
  • D’harmoniser nos normes commerciales et d’améliorer les normes sanitaires et phytosanitaires pour fluidifier les échanges.

La sécurité alimentaire, c’est aussi la mer…

Le Premier ministre de la République de Maurice, Dr Navinchandra Ramgoolam, rappelle l’importance à accorder aussi à l’océan; autrement dit, aux ressources marines:

« La sécurité et la souveraineté alimentaires concernent aussi le secteur de la pêche artisanale et industrielle, d’autant plus que les produits de la mer représentent la principale source de protéines pour plus d’un tiers de nos populations. Nous avons donc la responsabilité d’unir nos forces pour faire émerger une économie bleue innovante, génératrice de croissance et d’emplois, et respectueuse des écosystèmes. Pour chacun de nos pays, l’économie bleue est une priorité dont l’importance ne fait qu’augmenter. A cet égard, nous nous félicitons de notre engagement collectif sur la pérennisation du Plan Régional de Surveillance des Pêches et surtout des progrès accomplis dans l’établissement d’un mécanisme régional de contrôle et de surveillance des pêches afin de combattre et d’éliminer la pêche illégale. Il est utile de rappeler que nos zones économiques exclusives combinées dans l’océan Indien ont une superficie de plus de 6 millions de kilomètres carrés, avec des ressources halieutiques estimées à environ 50 milliards d’euros. Ces efforts collectifs ont un effet de dissuasion indéniable limitant la pêche Illicite, Non-déclarée et Non-règlementée. »

En écho, le président de la République des Seychelles, M. Wavel Ramkalawan, confirme le potentiel de l’économie bleue et, surtout, l’importance de cadres de coopération pour atteindre des objectifs communs et ambitieux:

« Pour les États insulaires comme les nôtres, cela nécessite un modèle de développement adapté à nos spécificités géographiques et environnementales. Ce modèle doit reposer sur une approche intégrée de l’économie bleue, articulée autour de la sécurité maritime, de la gouvernance des océans, de la connaissance scientifique et de la préservation de l’environnement marin. Ce modèle doit également promouvoir des échanges équilibrés, la valorisation des ressources locales et une meilleure inclusion sociale. Il s’agit d’un levier essentiel pour lutter durablement contre la pauvreté et les inégalités dans notre région. La conjoncture internationale actuelle, marquée par l’instabilité géopolitique, les perturbations logistiques et l’inflation des prix des denrées, confirme la nécessité de renforcer nos mécanismes de coopération régionale. Des cadres comme la COI sont plus que jamais pertinents pour coordonner nos réponses et mutualiser nos effort »

Bilan de 40 ans de coopération

Le Sommet de la COI a également été l’occasion de dresser le bilan de 40 ans de coopération régionale. En effet, la COI est née en 1982 par la Déclaration de Port-Louis et fût formellement établie par l’Accord de Victoria de 1984.

D’une « structure légère » pilotée directement par des administrations des Etats membres, elle s’est muée en une organisation intergouvernementale reconnue et active. Les missions de la COI se sont élargies au fil des années pour mieux répondre aux besoins de ses Etats membres. De même, ses zones d’intervention dépassent la seule région de l’Indianocéanie selon les programmes et partenariats. Ainsi, la COI pilote ou coordonne des initiatives sur les pêches, la sécurité maritime, le climat ou encore l’économie bleue qui couvrent jusqu’à 20 pays d’Afrique!

En 40 ans, la COI a, entre autres:

  • Mis en oeuvre ou coordonner plus de 100 initiatives et projets;
  • Mobiliser plus de 400 millions d’euros pour la région.

Et la COI reste une organisation de proximité efficiente au regard du coût-bénéfices: pour 1 € investi en contributions statutaires des Etats membres, la COI dépense en moyenne chaque année entre 4 et et 12 € au profit des Etats membres (formations, équipements, expertises, actions de terrain, subventions…).

Le Sommet était aussi une occasion de mettre en valeur les partenariats de la COI, non seulement à travers une séquence d’allocution des partenaires et observateurs, mais aussi à travers une exposition de photographie organisée en marge des travaux.

Une aventure insulaire

A l’occasion du 5e Sommet, le Secrétariat général a édité un ouvrage spécial intitulé « Une aventure insulaire ». Cette publication présente, à grands traits, l’histoire de la COI. Surtout, elle met en lumière une sélection de 40 résultats et impacts de la COI.

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