L’utilisation de ressources naturelles et la consommation de matériaux ont augmenté de manière exponentielle au cours des 20 dernières années (Schandl et al., 2018 ; Wiedmann et al., 2015). Elles ont conduit à divers problèmes environnementaux tels que la crise de la biodiversité mais aussi
à des enjeux socioéconomiques du fait de l’élargissement de l’écart de ressources (Marques et al., 2019 ; Teixidó-Figueras et al., 2016). Le système économique global et les manières capitalistes d’exploiter les ressources naturelles ont été vus comme les responsables majeurs de cette situation (Seis, 2001). Depuis les années 60, des systèmes alternatifs ont été promus, dont la nécessité d’une économie circulaire (EC) qui est réparatrice par dessein (Winans et al., 2017). Le concept maintenant se généralise et a vu sa mise en œuvre sous d’autres appellations telles que les économies verte et, plus récemment, bleue (D’Amato et al., 2017 ; Twomey & Washington, 2016).

Parmi les définitions existantes de l’EC, Kirchherr et al. (2017) ont fourni une formulation utile pour le projet courant des Indian Ocean Developing Island States (IODIS) : un « système économique qui substitue au concept de “fin de vie” la réduction, alternativement la réutilisation, le recyclage et la récupération des matériaux dans les processus de production/distribution et consommation ». L’EC opère à différents niveaux, du niveau micro (produits, compagnies, consommateurs), le niveau meso (parcs éco-industriels) et le niveau macro (ville, région, nation et au-delà) (ibid). L’EC a aussi, de plus en plus, été associée au développement durable en tant qu’étape essentielle à sa mise en œuvre (Suárez-Eiroa et al., 2019). Elle a reçu une attention croissante des gouvernements, du secteur privé
et du monde universitaire (D’Adamo, 2019; Suárez-Eiroa et al., 2019). L’Union européenne (UE), par exemple, a adopté un plan d’action en 2015 pour aider à stimuler sa transition vers une EC (Domenech & Bahn-Walkowiak, 2019). Des pays comme la France et les Pays-Bas sont vus comme plaidant en faveur de la mise en œuvre de l’EC. Des initiatives globales aussi se multiplient, telles que le Partenariat mondial d’action sur les déchets plastiques, le Partenariat pour l’électronique circulaire ou l’Alliance globale des batteries (WEF, 2020). Pour les Etats insulaires en développement d’Afrique et de l’océan Indien (AIODIS) ainsi que les pays africains en général, à l’exception de l’île de La Réunion, l’économie circulaire est toujours un concept naissant (Desmond & Asamba, 2019). Néanmoins, elle représente une opportunité de relever les défis auxquels les AIODIS sont confrontés en tant qu’Etats insulaires, dont l’accumulation de déchets dégradant l’environnement et la dépendance des importations pour les biens et matériaux (Dussaux & Glachant, 2019; Romero-Hernández & Romero, 2018).

L’objectif du rapport est d’examiner le niveau de mise en œuvre de l’EC dans les AIODIS. Dans l’agenda courant pour l’économie bleue que plusieurs AIODIS ont adopté, elle présente l’opportunité de bâtir une économie circulaire robuste pouvant être moins dépendante des intrants externes. Elle est particulièrement pertinente pour des domaines clés de l’économie bleue, basés sur les récoltes/extractions, l’utilisation de ressources renouvelables et non-renouvelables ainsi que le commerce et
les échanges transfrontaliers. Mettre en œuvre une EC procure l’opportunité de réaliser une croissance durable et inclusive. Le cadre d’EC utilisé pour ce rapport est celui de la Fondation Ellen MacArthur qui a fait œuvre de pionnière et promu la mise en œuvre de l’EC depuis 2013. Ce cadre est fondé sur trois principes : préserver et rehausser le capital naturel en contrôlant des stocks limités et en équilibrant les flux de ressources renouvelables (P1) ; optimiser les rendements de ressources en
faisant circuler à tout moment les produits, composants et matériaux au niveau d’utilité le plus élevé tant dans le cycle technique que biologique (P2) ; et, favoriser l’efficience du système en révélant et en combattant les effets externes négatifs (P3) (EMF 2015)

Le rapport débute par une brève description du cadre théorique basé sur le schéma du système d’EC, puis il présente les cadres et stratégies courantes au sein des AOIDIS qui peuvent être apparentés à une EC. Il poursuit avec une discussion des défis à relever pour réaliser une EC dans les AOIDIS. Il conclue avec les opportunités qui peuvent être développées au sein des AOIDIS pour dynamiser leur EC et contribuer à des économies bleues durables.